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La théorie de Carol Gilligan et le sens du moi de la femme

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La théorie de Carol Gilligan propose une perspective différente des études menées par Lawrence Kohlberg sur le développement moral de l’être humain. Pour cette psychologue, philosophe et féministe de l’Université Harvard, le problème de Kohlberg était qu’elle marquait des différences claires entre le développement des garçons et des filles dans ce domaine.

Les femmes, selon l’approche de Kohlberg, feraient preuve d’une certaine « faiblesse morale ». Non seulement elles furent plus lentes à consolider les différents niveaux de compétence morale, mais elles n’atteignirent pas non plus le stade le plus élevé, celui de l’éthique de la justice.

Maintenant, il convient de noter que Carol Gilligan connaissait très bien le travail de Kohlberg car elle était son assistante de recherche entre 1964 et 1967. Ainsi, une chose qu’elle déclara souvent dans ses articles et publications est que son mentor utilisa des dilemmes moraux hypothétiques qui étaient clairement biaisés en faveur du sexe masculin.

Sans compter qu’une grande partie de l’échantillon de leurs enquêtes étaient des enfants. Cela amena Gilligan a publier, quelques années plus tard, son ouvrage In a Different Voice.

Les femmes, contrairement aux hommes, ne se concentrent pas uniquement sur le respect des droits moraux ou l’éthique de la justice. Selon Gilligan, elles évolueraient dans le contexte, dans les relations et dans une conception globale qui transcende le normatif.

La théorie de Carol Gilligan, une perspective féministe

Pour comprendre la signification de la théorie de Carol Gilligan, nous devons comprendre le contexte. C’était la décennie des années 70-80. Les mouvements féministes cherchaient à prendre pied dans la société et à reformuler des théories mettant en évidence les préjugés sexistes.

De même, il faut aussi considérer que Lawrence Kohlberg présenta sa thèse de doctorat sur le développement moral en 1958, dans un contexte sexiste dont elle ne pouvait s’isoler complètement. Sa théorie comportait trois niveaux, le préconventionnel, le conventionnel et le postconventionnel. Dans chacun d’eux, il y avait également deux étapes.

Kohlberg montra que tout le monde n’atteint pas les plus hauts niveaux de développement moral. En outre, elle souligna que les filles avaient des scores plus élevés dans la recherche de l’approbation des autres. Les enfants, eux, atteignirent des niveaux plus élevés de conscience morale et étaient davantage préoccupés par les lois de la société.

La théorie de Carol Gilligan serait révélée des années plus tard, devenant rapidement un classique de la littérature féministe. Le magazine Time en vint à la reconnaître comme l’une des 25 personnes les plus influentes. Mais son approche n’est pas exempte de critiques. Nous l’analysons.

En 1977, Carol Gilligan publie un article dans lequel elle reformule la théorie du développement moral de Kohlberg pour y ajouter une perspective de genre centrée sur la figure de la femme.

Les étapes du développement moral, selon Gilligan

La théorie de Carol Gilligan prit de l’importance après la publication de son célèbre article In a Different Voice en 1977. Dans ce travail de recherche, Kohlberg écarta les préoccupations et les expériences des femmes.

De plus, l’échantillon avec lequel elle fit ses recherches était clairement biaisé : la majorité étaient des enfants ou des jeunes blancs de la classe moyenne ou supérieure. Gillian proposa un modèle alternatif permettant de révéler le moi de la femme dans ce processus de développement moral. Nous l’analysons.

Morale préconventionnelle

A ce premier niveau, il n’y a pas beaucoup de différences par rapport à ceux définis par Kohlberg : le jugement moral de la fille se concentrerait entièrement sur elle-même et le besoin de survivre. Elle priorisera toujours ses propres besoins.

Cependant, vient plus tard une autre étape de cette période, où la jeune femme commence à valoriser ses liens avec les autres. Elle comprend que se concentrer sur elle-même est un acte égoïste.

Morale conventionnelle

Dans la théorie de Carol Gilligan, cette étape est la plus illustrative. L’un des concepts qui définit le mieux cette psychologue est son regard sur l’aspect des soins et la dimension traditionnellement associée aux femmes.

Quelque chose qui définit les femmes dans une partie de leur vie est le souci des autres. Cette priorité les conduit alors parfois au sacrifice de soi et à l’annulation de l’attention pour elles-mêmes. C’est une morale centrée sur l’abnégation. Rappelons que cette théorie a été énoncée dans les années 70-80. L’éducation reçue et les modèles de genre modifiaient cette perception. Il s’agit de quelque chose que Kohlberg n’a pas pris en compte.

Maintenant, à l’intérieur du stade conventionnel, il y a un deuxième niveau. Celui où les femmes commencent à prendre conscience qu’elles doivent parvenir à un meilleur équilibre entre leurs besoins et ceux des autres.

La morale postconventionnelle et la théorie de Carol Gilligan

A ce stade, Gilligan établit que la femme atteint un jugement moral dicté par le principe de non-violence (ni sur elle-même ni sur les autres). Les propres besoins sont aussi importants que les besoins des autres. L’égalité est la clé.

Dans cette phase, le sens du moi d’une femme atteint son plus haut niveau car elle comprend qu’elle ne doit pas être exploitée.

Cela implique de devoir trouver leur place dans la société et dans leurs relations. C’est là qu’elles peuvent atteindre un bon équilibre. Celui dans lequel elles peuvent se développer et atteindre leur plein potentiel, mais sans être exclusivement subordonnés à la promotion du bien-être des autres.

Selon Gilligan, le sens de l’identité d’une femme est toujours aux prises avec deux tendances : le besoin de connexion et d’attention aux autres, avec celui de sa propre indépendance.

Carol Gilligan

Critiques du modèle de Gilligan

L’une des critiques les plus courantes de la théorie de Carol Gilligan a beaucoup à voir avec l’accent mis sur l’idée que les femmes ont besoin d’attention et de soins. D’une certaine manière, cette vision perpétue encore une fois le rôle de soignant associé au genre féminin. L’idée que les hommes ne se soucient pas autant que les femmes de la connexion et des relations est également critiquée.

Il y a par ailleurs un autre aspect qui reste en évidence et qui la fait peut-être tomber dans la même erreur que Kohlberg. Carol Gilligan, comme son mentor, tient pour acquis que les garçons et les filles présentent un développement moral et éthique différent. Encore une fois, les différences liées au sexe se perpétuent.

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