L’accord résultant d’une négociation est généralement satisfaisant et dure aussi longtemps que les parties qui le signent sentent qu’ils y gagnent quelque chose. Et, justement, pour gagner du terrain dans les contextes de négociation, les professionnels utilisent souvent des techniques avec de très bons résultats. Aujourd’hui, nous voulons parler d’une technique très puissante : la technique de la porte-au-nez.
Nous allons ici vous présenter cette technique et vous indiquer quelles sont ses caractéristiques.
La porte-au-nez
La technique dite de « la porte-au-nez » consiste à faire une proposition que l’on sait que l’autre rejettera, de sorte que lorsqu’on en fera une seconde, elle paraîtra plus séduisante. Ainsi, la première proposition (demande) présentée à un client peut être trop faible ou très exigeante, sollicitant ainsi le rejet, afin d’obtenir l’acceptation d’une seconde plus raisonnable.
L’effet obtenu par cette technique se base sur la comparaison des propositions soumises consécutivement (d’abord, celle qui, d’après nous, sera rejetée ; ensuite, celle que l’on souhaite faire accepter est présentée) ; c’est-à-dire que la seconde, qui est la « plus fiable », sera comparée à la première, qui s’est avérée irrationnelle, improbable, etc.
Si nous négocions avec un sponsor pour investir dans notre entreprise, nous pouvons demander, dans un premier temps, 10 000 euros ; comme il s’agit d’une somme très importante, malgré son budget, le parrain pourrait refuser. Ainsi, en faisant une deuxième demande de 6 000 euros par la suite, cette offre deviendra plus attractive par rapport à la première.
La technique du pied dans la porte
Cette technique suggestive a sa contrepartie, la technique du pied dans la porte. La personne qui l’utilise commence ainsi par faire des demandes qu’il sait que l’autre lui accordera. L’idée est d’augmenter progressivement le degré de ces demandes, pendant que l’autre partie se dit : si j’ai déjà accordé cela, pourquoi ne devrais-je pas l’accorder ? Si je suis déjà arrivé jusque là pour négocier, pourquoi ne pas céder un peu plus et conclure l’affaire ?
La technique du pied dans la porte a été mise en évidence dans une expérience de Freedman et Fraser (1966). Cette dernière consistait à faire une simple demande, que presque personne ne refusait, pour en demander une plus plus importante par la suite (c’était l’objectif principal). La deuxième demande a eu une acceptation de 76 %. En revanche, lorsqu’elle était demandée sans faire la première, elle n’était acceptée qu’à 17 %. Curieux, n’est-ce pas ?
L’efficacité de la technique de la porte-au-nez
Le psychologue Robert B. Cialdini a réalisé une expérience pour démontrer l’efficacité de la technique de la porte-au-nez.
Une demande importante a été faite à un groupe d’étudiants : accompagner un groupe de jeunes délinquants au zoo. Seuls 17 étudiants sur 100 ont accepté la demande. Cette même demande a été faite à un autre groupe d’élèves, mais avant qu’on ne leur en fasse une bien plus difficile : faire partie d’un programme de réinsertion pour jeunes délinquants pendant deux ans, à raison de deux heures par semaine. Dans ce deuxième groupe, l’acceptation de la première demande a été trois fois plus élevée.
L’utilisation de la technique de la porte-au-nez dans le développement d’une négociation est plus efficace pour atteindre l’objectif proposé, si l’on évite de demander directement ce que l’on veut. Le contournement de la première demande augmente les chances que la seconde soit acceptée grâce aux effets suivants :
- Responsabilité de la décision prise : en refusant la première demande, l’individu croit maîtriser la situation et pense avoir convaincu l’autre. Avoir l’illusion d’être responsable des accords fait accepter la seconde demande de l’autre commerçant, sans se rendre compte que cela a toujours été le véritable but de ce dernier.
- Satisfaction de l’accord final : la personne qui a l’illusion d’avoir maîtrisé la négociation se sent satisfaite, sans se douter des véritables intentions de son homologue.
Réciprocité dans la négociation
La réciprocité repose sur des relations de concessions mutuelles, dans lesquelles, si une partie cède, l’autre doit également le faire, non seulement pour qu’une négociation réussisse, mais aussi pour que les deux parties se sentent respectées mutuellement. Cela a une influence significative sur la façon dont les deux demandes sont perçues par le demandeur et celui qui reçoit les réclamations.
Ainsi, d’après ce qui précède, pour que la technique de la porte-au-nez soit efficace, les conditions suivantes doivent être réunies :
- La première demande doit être exagérée, mais pas démesurée afin de paraître crédible.
- Les deux demandes doivent se faire par le même demandeur. En plus de cela, elles doivent être similaires pour que la non-acceptation de la première et l’acceptation de la seconde aient un sens.
- Les deux demandes doivent se faire dans un court laps de temps ; plus il s’écoule de temps entre la première et la deuxième demande, moins cette dernière sera acceptée.
Il est important que l’autre partie, en rejetant la première offre, se sente décidé à accepter la seconde – car c’est la plus raisonnable des deux offres – et ainsi conclure l’accord, satisfait, avec le demandeur.
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