Les obsessions sont des pensées, des images ou des impulsions qui ressemblent à un morceau de nourriture que nous mâchons et remâchons, mais que nous ne parvenons pas à avaler. Tous les êtres humains, dans une mesure plus ou moins grande, les ont déjà expérimentées.
Il est vrai que certaines personnes souffrent plus de ces intrusions que d’autres. Pour autant, elles sont tout à fait normales initialement, produites par un cerveau bien développé. Par conséquent, nous tomberions dans l’erreur si nous en venions à les conceptualiser comme quelque chose de pathologique.
Le fait d’avoir un type d’intrusion ou un autre ne définit pas la personne. Elles apparaissent donc simplement. C’est quelque chose de semblable à ce qui se passe quand nous rêvons. Il est normal d’avoir des rêves qui ne correspondent pas à nos valeurs ou à notre façon de penser. D’ailleurs, une fois réveillés, nous sommes capables de ne pas leur donner trop de valeur et de les oublier.
Ce qui se passe chez certaines personnes, c’est qu’elles font un processus de fusion avec leur propre contenu mental. Elles accordent ainsi aux obsessions une importance et une valeur qu’elles n’ont pas vraiment. Dans le trouble obsessionnel-compulsif, le patient traversé par une obsession va donc en déduire que s’il ne l’assouvit pas, quelque chose de mal va se produire.
Paul Salkovkis, tenant compte de ce qui précède, a présenté l’une des premières formulations cognitives sur l’anxiété, et plus particulièrement sur le TOC.
Les gens ont des milliers de pensées chaque jour, de leur réveil jusqu’à leur sommeil. Certaines de ces intrusions sont liées à notre personnalité. Cest-à-dire qu’elles sont égosyntoniques. D’autres, par contre, nous semblent totalement répugnantes et nous ne les fusionnons pas avec nous.
La théorie de Salkovskis : pensées contre obsessions
Dans le but de commencer à étudier les processus que nous avons commentés, Paul Salkovskis, en 1985, propose sa théorie cognitive. L’auteur fait la distinction entre les pensées automatiques négatives et les obsessions. Une pensée automatique négative est un rapport subjectif qui se déroule devant certaines circonstances sans que celles-ci soient traitées en profondeur (Rachman, 1981).
Selon Salkovskis, il est possible d’établir des différences importantes entre les pensées automatiques et les obsessions. Ces différences dépendent du degré d’intrusion perçu, du degré d’accessibilité à la conscience et de la mesure dans laquelle elles sont conformes au système de croyances de la personne.
Cette dernière différence, à savoir la mesure dans laquelle elles sont conformes à notre système de croyances, est fondamentale. Une obsession est dérangeante et génère de l’inconfort parce qu’elle a à voir avec quelque chose qui a une grande valeur pour la personne.
Salkovskis soutient que les pensées obsessionnelles fonctionnent comme un stimulus qui peut provoquer un type particulier de pensée automatique. Les données disponibles montrent que les intrusions se produisent souvent dans une population non clinique sans générer un haut degré d’inconfort.
Celles-ci ne deviendront un problème que si elles donnent lieu à une série de pensées automatiques négatives, à travers l’interaction de telles intrusions inacceptables pour l’individu. L’inconfort est donc fonction de la signification spécifique de la pensée pour ce patient.
La responsabilité en tant que schéma
Les patients atteints de trouble obsessionnel-compulsif surestiment souvent les limites de leur responsabilité. La moindre possibilité de préjudice – réel ou imaginaire – devient ainsi intolérable pour la personne. Elle essaiera alors de la neutraliser par tous les moyens. Une telle tendance pourrait être une conséquence du fait d’avoir supporté des obligations à un très jeune âge.
Ce schéma de responsabilité, alors que la personne immature disposait de peu de moyens pour gérer cette pression, aurait donné lieu à la formation de différents hypothèses et automatismes :
- Penser à une action est égal à faire cette action
- Etre incapable de prévenir les préjudices, cela en revient à causer des préjudices
- Etre responsable en fonction d’autres facteurs, tels que la faible probabilité qu’un événement se produise
- Ne pas mener le processus de neutralisation quand l’intrusion se produit, c’est comme vouloir faire du mal
- Savoir qu’une personne doit et peut contrôler ses propres pensées en tout temps
Les pensées ou images automatiques déclenchées par les obsessions tournent autour de cette responsabilité – « si les choses tournent mal, ce sera de ma faute ». Cette culpabilité n’apparaît pas seulement face à la réalité, mais aussi face à une possibilité imaginaire. Rien qu’en ayant cette pensée, l’individu se sent déjà mal et responsable.
Cette situation est semblable au péché par la pensée. Par conséquent, le patient ressent le besoin d’arrêter les dommages et la culpabilité qu’il ressent. Pour cela, il utilise des techniques de neutralisation. Les neutralisations, selon la théorie de Salkovskis, sont comprises comme des tentatives pour éviter ou réduire la possibilité d’être responsable des dommages qui peuvent être causés.
Le problème, c’est que la solution supposée finit par devenir le problème principal. La personne est prise entre ses obsessions et ses compulsions qui limitent sa vie d’une manière extrême.
A partir de cette théorie, le patient est invité à considérer ces intrusions comme du « bruit ». Il doit alors les dépouiller de leur valeur, et non fusionner la pensée avec sa personne et la réalité. Pour cela, en plus de la thérapie cognitive, il sera nécessaire d’empêcher l’exécution des rituels, ce qui entraînera une accoutumance et démantèlera les croyances sur les préjudices et les responsabilités personnelles.
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